2017

La pièce

Martin Crimp

Création prévue en 2019.

Sur le plateau : Arnaud Bouquinet, Jesshuan Diné, Emma Gustafsson, Eric Pécout. Mise en scène : Jesshuan Diné. Assistant à la mise en scène : Sylvain Eymard.

Collaboration scénographique & création lumières : Dominique Drillot.

Le texte de Martin Crimp (2010, titre original The Play) est publié chez l'Arche Editeur dans une traduction de Philippe Djian.


Lectures préalables du projet /

au Théâtre du Bois de l'Aune (octobre 2016)

à La Distillerie, dans le cadre du festival "Place aux compagnies" (avril 2017)

à l'Espace Alya, dans le cadre des Plateaux Ouverts (juillet 2017)

 

Sorties de résidences /

au Théâtre Joliette-Minoterie (avril 2017)

« Elle enlève ses lunettes et regarde par la fenêtre comme si elle n'avait pas entendu. Il Il fait grand jour, à présent. Cela fait des années que nous voulons mettre des stores. Je déteste la façon dont le lait se réchauffe dans la bouteille et une fois qu'il s'est réchauffé, ne serait-ce qu'une fois, vous pouvez le remettre au frigo, vous pouvez le réutiliser, mais il a toujours cette odeur. »

Résumé de la nouvelle


John est auteur pour le théâtre. Par tranches de vies ancrées dans le présent, et quelques flash-backs, il nous raconte son quotidien aux côtés de Madeleine, sa compagne comédienne, dans leur spacieuse villa d'un quartier très prisé. Il nous parle également de ses parents, ses réunions professionnelles teintées de cynisme, et l'irruption de cette pièce de théâtre, écrite par une auteure hâtivement jugée talentueuse par la direction, alors que lui pense à une imposture. Cette pièce, qui ne sera jamais racontée, finit par diviser le couple, déjà fragilisé par la jalousie et l'ambition personnelle. Au-delà des disputes, le narrateur, en perte de sens, s'interroge sur son propre confort, le don de soi, les représentations sociales, et l'hypocrisie de son microcosme.

Note d'intention (extraits)


La Pièce n'est pas initialement écrite pour la scène, et c'est sans doute une des raisons qui expliquent mon choix d'y travailler. Nous sommes dans un récit totalement subjectif, du fait de sa forme, et l'individualité de la voix qui nous parle est perturbante, intrigante, car il nous manque à chaque paragraphe le point de vue de l'autre partie du couple, celui de Madeleine. Ce n'est pas forcément un point de vue qu'il faudra « restaurer » par un procédé scénique ; gardons ouvertes les questions de légitimité de ce point de vue unique… John viendra donc raconter seul son histoire, par une adresse public très directe, une certaine drôlerie communicative, en décalage et en distance, dans une posture très bancale. En même temps il peut passer d'un registre à l'autre, de l'humour à l'ironie, de la connivence du spectateur à la description plate de son journal, d'une envolée lyrique ou puissante, à la trivialité du plateau... Ce dernier finit par "se refermer" sur son personnage. Ce que l'on avait pris pour une lecture aux airs de "one man show" s'avère être une expérience qui va au-delà, comme un geste de fragilité témoignant d'une certaine forme de solitude ou de désespoir, devant une perte de contrôle assumée. On ne sait plus s'il s'agit de l'expérience du personnage, ou de l'acteur, se mettant lui-même en scène. L'écrivain s'isole, s'empêtre dans l'alcool, l'ironie et des gestes de théâtre vains, trop vite avortés.

 

D'un point de départ concret et hyper-réaliste (la lecture que va faire le comédien), la scène se métamorphose petit à petit dans l'idée d'une "poésie brute du plateau". Les espaces se révèlent (ou plutôt s'"évoquent") comme s'ils s'"écrivaient" sous nos yeux, dans le flot du récit, suivant son mouvement. Dans les allers-retours de l'écriture, et la brume qu'elle dégage, un concert de jazz pourra coïncider avec la construction d'un appartement ou la préparation d'une tranchée dans le bitume.

La scène évolue au gré de ses installations et désinstallations : règlements des lumières, essais d'ambiances, révélations d'éléments d'un décor incertain, en perpétuel remaniement. Le plateau devient lieu de vie, où coïncident par exemple le récit de John avec la machine à café bruyante des techniciens qui prennent leur pause.

 

Pour qu'à la fin tout s'efface... nous laissant seul avec l'acteur/écrivain, résigné à revivre cette "dispute sordide entre mari et femme de chaque côté d'une porte fermé" et nous lire les derniers mots d'un script "qui ne peut plus être sauvé.", loin de délivrer un éclairage sur l'amour, sur le monde ou la politique. Le récit de John est devenu la pièce q'il voulait dénoncer. En véritable tragédie contemporaine, nous sommes renvoyés à nos jouets et notre mode de vie, nos « espaces gratifiants » et nos blessures narcissiques.

La construction du projet avec mes camarades de scène s’imprégnera à chaque étape d'une expérience qui croise ces enjeux, à la lumière de la situation présente (espace dans lequel nous travaillons, temporalité du projet). Ce récit, d'une grande qualité littéraire, ne peut être qu'abordé dans un souci d'immersion permanente, et à chaque fois renouvelée, car son propos dépasse la simple fable, et touche à notre intégrité d'acteurs, auteurs, spectateurs... avec beaucoup d'humour et de dérision.

 

Jesshuan Diné.

 

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inclus note d'intention et étapes de création
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Ébauches scénographiques


Croquis du scénographe Dominique Drillot. Premières pistes pour réflexion sur le projet.